- NORMÉS (ESPACES VECTORIELS)
- NORMÉS (ESPACES VECTORIELS)L’analyse fonctionnelle linéaire, en tant que théorie générale, s’est créée au début du XXe siècle, autour des problèmes posés par les équations intégrales. Entre 1904 et 1906, D. Hilbert (1862-1943) est amené à étudier des développements en séries de fonctions orthogonales, ainsi que des formes quadratiques à une infinité de variables. À sa suite, F. Riesz (1880-1956) et E. Fischer (1875-1959) étudient les fonctions de carré intégrable et la convergence en moyenne quadratique, puis F. Riesz introduit les espaces Lp pour 1 麗 p 麗 + 秊 et la moyenne d’ordre p . Toutefois, ce n’est que vers 1920 que la notion d’espace normé abstrait est dégagée, principalement par S. Banach (1892-1945), et ce n’est qu’en 1929-1930 que J. von Neumann (1903-1957) propose une présentation axiomatique des espaces de Hilbert. S. Banach, dans sa thèse de 1920 intitulée: Sur les opérations dans les ensembles abstraits et leur application aux équations intégrales , écrit: «L’ouvrage présent a pour but d’établir quelques théorèmes valables pour différents champs fonctionnels, que je spécifie dans la suite. Toutefois, afin de ne pas être obligé à les démontrer isolément pour chaque champ particulier, ce qui serait bien pénible, j’ai choisi une voie différente que voici: je considère d’une façon générale les ensembles d’éléments dont je postule certaines propriétés, j’en déduis des théorèmes et je démontre ensuite de chaque champ fonctionnel particulier que les postulats adoptés sont vrais pour lui.»Par la suite, les espaces vectoriels normés ont été étudiés de manière autonome, notamment du point de vue de leur géométrie. Parallèlement, l’obligation, en théorie des équations aux dérivées partielles par exemple, de considérer des espaces de fonctions dont la topologie n’est pas déduite d’une norme a motivé l’introduction d’une structure plus générale: celle d’espace vectoriel topologique (cf. espaces vectoriels TOPOLOGIQUES). Toutefois, en raison de la spécificité des problèmes et des méthodes, les espaces vectoriels normés ne doivent pas être considérés comme de simples cas particuliers d’espaces vectoriels topologiques. De plus, les espaces vectoriels topologiques les plus importants peuvent être construits en un certain sens à l’aide d’espaces vectoriels normés, et bénéficient donc pour leur étude des propriétés de ces derniers. En retour, les espaces vectoriels topologiques interviennent dans l’étude des espaces normés, notamment pour tout ce qui concerne les convergences faibles.Dans la seconde moitié du XXe siècle, l’évolution de la théorie est considérable, particulièrement en ce qui concerne la géométrie des espaces de Banach et ses liens avec les ensembles d’opérateurs que l’on peut définir entre les espaces étudiés.1. Espaces vectoriels normés, espaces de Banach: définitions et premières propriétésDans ce qui suit, on ne considérera que des espaces vectoriels sur le corps R des nombres réels ou sur le corps C des nombres complexes. Pour éviter de préciser à chaque fois, on désignera par K ce corps de base; pour 見 捻 K, la notation | 見| désignera donc soit la valeur absolue de 見 si K = R, soit le module de 見 si K = C.Soit E un espace vectoriel sur K. On appelle norme sur E une application (notée traditionnellement x 料 瑩x 瑩; on dit aussi que 瑩x 瑩 est la norme de x ) de E dans l’ensemble R+ des nombres réels positifs ou nuls qui possède les propriétés suivantes:(1) Condition de séparation :(2) Homogénéité :quels que soient x 捻 E et 捻 K;(3) Inégalité du triangle :Un espace vectoriel muni d’une norme s’appelle un espace vectoriel normé . Remarquons que la restriction d’une norme à un sous-espace vectoriel est une norme, appelée norme induite, sur ce sous-espace. Si la condition de séparation n’est pas satisfaite, on dit qu’on a seulement une semi-norme; l’espace quotient de E par la relation d’équivalence:est alors muni de manière naturelle d’une norme, car le nombre 瑩x 瑩 ne dépend que de la classe de x (espace normé associé).Tout espace vectoriel E est un espace métrique pour la distance:déduite de la norme. On peut donc appliquer aux espaces vectoriels normés le langage géométrique de l’analyse (boules, ouverts et fermés, convergence, etc.) introduit dans l’article espaces MÉTRIQUES. Remarquons que si d est une distance sur un espace vectoriel déduite d’une norme, elle possède la propriété suivante d’invariance par translation :quels que soient x , y , z 捻 E. Ainsi, les boules de centre z sont les translatées des boules centrées à l’origine 0 de l’espace vectoriel qui s’obtiennent toutes par homothétie (d’après l’homogénéité de la norme) à partir de la boule unité ouverte:ou de la boule unité fermée:Ces boules unités sont des ensembles convexes, et on peut reconstituer la norme à partir de la boule unité par exemple; on suppose ici, bien entendu, K = R (cf. CONVEXITÉ, chap. 4).On dit qu’un espace vectoriel normé E est complet , ou encore est un espace de Banach , s’il est complet pour la métrique déduite de sa norme. Cela signifie ici qu’une suite (x n ) d’éléments de E est convergente si et seulement si:Si E est un espace vectoriel normé, on montre facilement que son complété (au sens de la théorie des espaces métriques ; cf. espaces MÉTRIQUES, chap. 3) peut être muni d’une structure d’espace de Banach qui prolonge celle de E. Ainsi, tout espace vectoriel normé peut être plongé dans un espace de Banach dont il soit un sous-espace dense; ce complété est unique à un isomorphisme d’espace vectoriel normé près .Il faut enfin mentionner que les espaces vectoriels normés apparaissent comme le cadre naturel de la théorie des séries et des familles sommables [cf. SÉRIES ET PRODUITS INFINIS].Les exemples que nous donnons maintenant fournissent un premier catalogue des espaces normés les plus courants. Remarquons que lorsque ces espaces ne sont pas complets, en vertu de ce qui a été dit précédemment, on étudie leur complété afin de se ramener à un espace de Banach.Espaces de dimension finieBien entendu, l’application x 料 |x | est une norme sur K considéré comme un espace vectoriel de dimension 1 sur lui-même (et aussi d’ailleurs de C comme espace vectoriel de dimension 2 sur R).Plus généralement, soit E un espace de dimension finie n que l’on identifie à Kn par le choix d’une base. On considère usuellement les normes:est une norme sur Kn (espaces de Minkowski). Sur un espace de dimension finie , on montre que toutes les normes sont équivalentes (cf. définition précise in chap. 3); cette propriété, comme on le verra ci-dessous, est caractéristique des espaces de dimension finie, et la situation est fondamentalement différente dans ceux de dimension infinie. Les espaces de dimension finie sont aussi caractérisés par le fait que leur boule unité est compacte (théorème de Riesz). Mentionnons enfin que tout espace vectoriel normé de dimension finie est nécessairement complet.La norme 瑩. 瑩2 sur Cn est associée au produit scalaire hermitien:qui munit Cn d’une structure hilbertienne; de manière générale, tout espace préhilbertien E est un espace vectoriel normé si on le munit de la norme:Norme de la convergence uniformeSi X est un ensemble, désignons par E = 龍(X, K) l’espace vectoriel des applications bornées de X dans K (rappelons que l’on a toujours K = R ou C); on appelle norme de la convergence uniforme la norme sur E définie par:On montre que 龍(X, K), muni de la norme de la convergence uniforme est un espace complet . Dire qu’une suite (f n) de fonctions converge vers f pour cette norme signifie ici que:c’est-à-dire que la suite des fonctions f n converge uniformément vers f . Dans le cas où X est un espace topologique, on montre que le sous-espace 暈 秊(X, K) des applications continues bornées de X dans K est fermé dans 龍(X, K) et, par suite (cf. espaces MÉTRIQUES, chap. 3), est aussi un espace de Banach pour la norme de la convergence uniforme.Espaces liés à l’intégrationSoit [a , b ] un intervalle fermé borné de R; désignons par C([a , b ], K) l’espace vectoriel des fonctions continues définies sur [a , b ] à valeurs dans K; pour tout nombre réel p 閭 1, on peut considérer la norme:appelée norme de la convergence en moyenne d’ordre p . Ces normes sont deux à deux non équivalentes, et C([a , b ], K) n’est complet pour aucune d’entre elles (alors que C([a , b ], K) est complet pour la norme de la convergence uniforme). Le complété de C([a , b ], K) pour une telle norme (cf. espaces MÉTRIQUES, chap. 3) n’est autre que l’espace Lp ([a , b ], K) des classes de fonctions à valeurs dans K, de puissance p -ième intégrale sur [a , b ] pour la mesure de Lebesgue (cf. INTÉGRATION ET MESURE, chap. 4). Pour p = 2 on obtient un espace de Hilbert, la norme étant associée au produit scalaire:Rappelons qu’une fonction mesurable définie sur [a , b ] à valeurs dans K (cf. INTÉGRATION ET MESURE, chap. 3) est dite essentiellement bornée par M si la mesure de l’ensemble des x tels que |f (x )| 礪 M est nulle; la borne supérieure essentielle , notée 瑩f 瑩 size=1秊, est le plus petit M réalisant la condition précédente.L’espace L size=1秊 ([a , b ], K) des classes de fonctions essentiellement bornées sur [a , b ] à valeurs dans K est normé par 瑩f 瑩 size=1秊; c’est alors un espace de Banach.Il existe d’autres exemples intéressants d’espaces de Banach liés à l’intégration, notamment les espaces d’Orlicz (cf. fonctions CONVEXES).Espaces de suitesSur l’espace l size=1秊 des suites bornées d’éléments de K on peut définir la norme:où u est la suite de terme général u n ; on obtient ainsi un espace de Banach. Remarquons que cet exemple peut être considéré comme un cas particulier de norme de convergence uniforme sur un espace 龍(X, K) de fonctions bornées en prenant X = N.L’espace c 0 des suites d’éléments de K qui convergent vers 0 (et sont donc bornées), muni de la norme induite par la norme 瑩 瑩 size=1秊 de l size=1秊, est un espace de Banach; c’est un sous-espace fermé de l size=1秊. On dispose d’un résultat analogue pour l’espace c des suites convergentes d’éléments de K.Pour p 閭 1 on définit l’espace l p des suites u = (u n )n size=1閭 0 d’éléments de K telles que 秊 |u n |p 麗 + 秊; muni de la norme: n = 0l p est un espace de Banach. Dans le cas p = 2, on obtient un espace de Hilbert, la norme étant déduite du produit scalaireDans toute la suite, les espaces l size=1秊,c ,c 0, l p , Lp ([a , b ], K) seront considérés comme normés de la façon indiquée dans les exemples. D’autre part, du point de vue des notations, lorsque aucune confusion n’en résulte, on se permettra de noter C(X), Lp ([a , b ]) les espaces C(X,K), Lp ([a , b ], K).Continuité d’une application linéaireSoit E et F des espaces vectoriels normés sur K (égal à R ou C) et:une application linéaire , c’est-à-dire telle que:quels que soient x , y 捻 E et, 猪 捻 K. Les trois conditions suivantes, apparemment de plus en plus fortes, sont en fait équivalentes:(1) L’application u est continue au point 0 捻 E;(2) L’application u est continue partout;(3) Il existe une constante M telle que:Ainsi, la continuité en un seul point (on se ramène à l’origine par translation) entraîne que u est uniformément continue (et même lipschitzienne, cf. espaces MÉTRIQUES, chap. 2), car on a (la linéarité est bien entendu ici essentielle): u (x ) 漣 u (y ) = u (x 漣 y ), d’où:Cette importante propriété rend les applications linéaires continues redevables des résultats relatifs aux applications uniformément continues. Le théorème de prolongement (cf. espaces MÉTRIQUES, chap. 3) donne ici: soit E un espace vectoriel normé, E un sous-espace dense et u : E F une application linéaire continue de E dans un espace de Banach F; alors il existe un prolongement linéaire continu unique u : EF à l’espace E tout entier (la linéarité du prolongement est évidente par continuité).Comparaison de normesConsidérons deux normes 瑩. 瑩1 et 瑩. 瑩2 sur un même espace vectoriel E et désignons par E1 et E2 les espaces vectoriels normés correspondants. On dit que la norme 瑩. 瑩1 est plus fine que la norme 瑩. 瑩2 si l’application identique de E1 dans E2 est continue, ce qui signifie que tout ouvert pour la norme 瑩. 瑩2 est un ouvert pour la norme 瑩. 瑩1.La condition ci-dessus montre que cela équivaut à dire qu’il existe une constante a 礪 0 telle que:pour tout x 捻 E. On dit que les deux normes sont équivalentes si elles définissent les mêmes ouverts, c’est-à-dire s’il existe des constantes strictement positives a et b telles que:Par exemple, si E et F sont des espaces vectoriels normés de normes respectives 瑩. 瑩 et 瑩. 瑩, on obtient sur E 憐 F trois normes équivalentes en prenant pour norme de l’élément (x , y ) 捻 E 憐 F respectivement l’un des trois nombres:On montre que, sur un espace vectoriel de dimension finie , toutes les normes sont équivalentes, mais inversement ce n’est plus nécessairement le cas en dimension infinie, comme le démontre l’exemple de l’espace E = C([0, 1]) muni des normes:on a ici 瑩f 瑩1 諒 瑩f 瑩 size=1秊, et, par suite, la norme de la convergence uniforme est plus fine que la norme de la convergence en moyenne, mais ces deux normes ne sont pas équivalentes. Il suffit pour s’en convaincre de remarquer que la suite (f n ) d’éléments de E, définie par:converge en moyenne vers la fonction 0 mais ne converge pas uniformément, car 瑩f n 瑩1 = 1/(2 n ) et 瑩f n 瑩 size=1秊 = 1.Norme d’une application linéaireSi E et F sont des espaces vectoriels normés, on désigne par 硫c (E, F) l’espace vectoriel des applications linéaires continues de E dans F. La présence du c en indice est destinée à éviter la confusion avec l’ensemble de toutes les applications linéaires (continues ou pas) de E dans F que les algébristes notent (cf. algèbre LINÉAIRE ET MULTILINÉAIRE) 硫(E, F); dans la pratique, cet indice saute, car le contexte indique toujours assez clairement si on impose la continuité ou pas... Dans ce qui suit, nous ne considérerons que des applications linéaires continues et, le lecteur (éventuel) étant prévenu, nous désignerons par 硫(E, F) l’espace vectoriel des applications linéaires continues de E dans F.On vérifie que l’application:est une norme sur l’espace vectoriel 硫(E, F). Le nombre 瑩u 瑩 s’appelle la norme de l’application linéaire u et admet aussi les expressions:ainsi, c’est la plus petite constante M telle que l’on ait:pour tout x 捻 E.On montre que l’espace vectoriel normé 硫(E, F) est complet si et seulement si F est complet. En particulier, le dual topologique 硫(E, K), qui est l’espace vectoriel des formes linéaires continues sur E, est toujours un espace de Banach; on le note E (ne pas confondre avec le dual algébrique).Remarquons enfin que si E, F et G sont trois espaces vectoriels normés, si u : EF et v : FG sont des applications linéaires continues, alors on a:en particulier, l’algèbre 硫(E, E) = 硫(E) des endomorphismes d’un espace vectoriel normé est une algèbre normée pour la norme introduite ci-dessus (cf. algèbres NORMÉES).Hyperplans fermésSoit E un espace vectoriel normé et F un sous-espace vectoriel de E. Si x et y appartiennent à l’adhérence F 漣 de F dans E, cela signifie qu’il existe des suites (x n ) et (y n ) d’éléments de F qui convergent respectivement vers x et y ; pour, 猪 捻 K, la suite (x n + 猪y n ) d’éléments de F converge versx + 猪y qui appartient donc aussi à F 漣. Ainsi, l’adhérence d’un sous-espace vectoriel est un sous-espace vectoriel. Si F est un sous-espace de dimension finie de E, on montre qu’il est toujours fermé, mais, dans les espaces de dimension infinie, il peut exister des sous-espaces distincts de leur adhérence, comme on va le voir.Rappelons (cf. algèbre LINÉAIRE ET MULTILINÉAIRE, chap. 4) qu’on appelle hyperplan d’un espace vectoriel tout sous-espace strict maximal, c’est-à-dire de codimension 1; si H est un hyperplan de E, il existe une forme linéaire u : EK, unique à un scalaire près, telle que H soit le noyau de u (on dit que u (x ) = 0 est l’équation de l’hyperplan). Supposons E normé et soit H un hyperplan; l’adhérence H est un sous-espace vectoriel de E qui contient H, et par suite, d’après la maximalité de H, on a soit H = H, c’est-à-dire que l’hyperplan H est fermé , soit H = E, c’est-à-dire que l’hyperplan est dense dans E. On montre facilement que, avec les notations données ci-dessus, l’hyperplan H est fermé si et seulement si la forme linéaire u est continue.La notion d’hyperplan partout dense étant peu intuitive, donnons un exemple simple de cette situation. Soit E l’espace vectoriel des polynômes à coefficients réels, muni de la norme de la convergence uniforme sur [0, 1], c’est-à-dire:la forme linéaire u définie par:n’est pas continue, car la suite (Pn ), définie par Pn (t ) = (t /2)n , converge vers 0 dans E; en effet, 瑩Pn 瑩 = (1/2)n ), alors que u (Pn ) = 1 ne converge pas vers 0. Il en résulte que l’espace vectoriel des polynômes P qui admettent le nombre 2 pour racine forme un hyperplan partout dense de E.Isomorphismes, isométriesUne application linéaire bijective u d’un espace normé E sur un espace normé F telle que u et u -1 soient continues est un isomorphisme de E sur F; deux espaces normés E et F sont isomorphes s’il existe un isomorphisme de E sur F; du point de vue topologique, les espaces E et F sont homéomorphes (cf. TOPOLOGIE GÉNÉRALE, chap. 1). Compte tenu de ce qui a été dit sur la continuité des applications linéaires, pour qu’une application linéaire surjective de E sur F soit un isomorphisme il faut et il suffit qu’il existe deux constantes C1 礪 0 et C2 礪 0 telles que pour tout élément x de E:(Remarquons que l’injectivité est conséquence de l’inégalité C1 瑩x 瑩E 諒 瑩u (x ) 瑩F et de la linéarité de u , si bien que si u n’est pas surjective on peut tout de même dire que u est un isomorphisme de E sur u (E).)Une application linéaire bijective u d’un espace normé E sur un espace normé F telle que pour tout x de E 瑩u (x ) 瑩F = 瑩x 瑩E est une isométrie , ou encore un normisomorphisme de E sur F; s’il existe une isométrie de E sur F, les espaces E et F sont dits isométriques ou encore normisomorphes.Tous les espaces de Banach de même dimension finie n sur K sont isomorphes; en revanche, ils ne sont pas tous isométriques comme le montre la considération des normes 瑩 瑩2 et 瑩 瑩 size=1秊 par exemple. Si 1 諒 p 麗 q 麗 + 秊, aucun sous-espace fermé de dimension infinie de l p n’est isomorphe à un sous-espace de l q ; aucun sous-espace fermé de c 0 n’est isomorphe à un sous-espace de l p . K1 et K2 étant deux espaces compacts, C (K1, R) et C (K2, R) sont isométriques si et seulement si K1 et K2 sont homéomorphes; C ([0,1], R) et C ([0,1] 憐 [0,1], R) ne sont donc pas isométriques; on peut montrer cependant qu’ils sont isomorphes.2. Les théorèmes généraux de baseEntre 1920 et 1930, S. Banach, H. Hahn, H. Steinhaus élaborent les théorèmes généraux de base de la théorie.Théorème de Hahn-BanachIl existe diverses versions de ce théorème; nous donnons ici une version analytique valide dans les deux cas: K = R ou K = C. Nous renvoyons à l’article CONVEXITÉ pour une forme géométrique de ce résultat.Soit E un espace vectoriel sur K, p une semi-norme sur E (cf. chap. 1) et f une forme linéaire sur un sous-espace F de E qui pour tout x de F vérifie |f (x )| 諒 p (x ). Il existe alors une forme linéaire g sur E qui prolonge f et qui vérifie |g (x )| 諒 p (x ) pour tout x de E.Les quatre théorèmes qui suivent reposent de manière essentielle sur la propriété de Baire des espaces métriques complets (cf. espaces MÉTRIQUES, chap. 4).Théorème de l’application ouverteSoit E et F deux espaces de Banach et u une application linéaire continue surjective de E sur F. L’image par u de tout ouvert de E (cf. TOPOLOGIE GÉNÉRALE, chap. 1) est alors un ouvert de F.On déduit immédiatement de ce théorème que si de plus u est injective alors u est un isomorphisme de l’espace de Banach E sur l’espace de Banach F. En particulier, lorsqu’un espace vectoriel E est muni de deux normes qui en font toutes deux un espace de Banach, il suffit de montrer que ces normes se comparent pour en conclure qu’elles sont équivalentes.Théorème du graphe ferméSoit E et F deux espaces de Banach. Pour qu’une application linéaire u de E dans F soit continue, il faut et il suffit que son graphe soit fermé dans l’espace produit E 憐 F.Théorème d’équicontinuité de BanachSoit (Ti )i size=1捻I une famille d’applications linéaires continues d’un espace de Banach B dans un espace vectoriel normé F. On suppose que, pour tout élément x de B, sup i 捻I 瑩Ti (x ) 瑩 麗 + 秊; alors sup 瑩Ti 瑩 麗 + 秊. i 捻IThéorème de Banach-SteinhausSoit E et F deux espaces de Banach et ( 糖n )n size=1捻N une suite d’applications linéaires continues de E dans F. Alors lim Tn (x ) n 轢秊d’un sous-ensemble dense de E et sup 瑩Tn (x ) 瑩 麗 + 秊 pour tout x élément n de E. Quand la limite T(x ) existe pour tout élément x de E, l’application 糖 est linéaire continue et 瑩 糖 瑩 諒 lim inf 瑩 糖n 瑩. n 轢秊3. La décomposition des espaces de BanachProduits d’espaces de BanachE et F étant deux espaces de Banach, la somme directe E 簾 F (cf. algèbre LINÉAIRE ET MULTILINÉAIRE, chap. 2) peut être munie d’une structure d’espace de Banach dont la topologie associée soit la topologie produit de celle de E par celle de F (cf. TOPOLOGIE GÉNÉRALE, chap. 1). Il y a en fait plusieurs normes qui réalisent cette condition, les plus utilisées étant 瑩(x , y ) 瑩p = (face=F0019 瑩x 瑩Ep + 瑩y 瑩Fp )1/p , où 1 諒 p 麗 + 秊 et 瑩(x , y ) 瑩 size=1秊 = max (face=F0019 瑩x 瑩E, 瑩y 瑩E). Évidemment, ces normes sont équivalentes et les espaces de Banach obtenus sont isomorphes.La complémentationSoit E 簾 F une décomposition en somme directe algébrique de l’espace de Banach X. E et F étant munis des topologies induites par celle de X, et E 簾 F de la topologie produit, nous dirons que E 簾 F est une décomposition en somme directe topologique si l’applicationest un homéomorphisme.En utilisant le théorème de l’application ouverte, on montre que pour qu’une décomposition en somme directe E 簾 F de l’espace de Banach X soit topologique il faut et il suffit que E et F soient des sous-espaces fermés de X.Le problème de la complémentation qui se pose alors est de savoir si, étant donné un sous-espace vectoriel fermé E d’un espace de Banach X, il existe un supplémentaire topologique de E dans X, c’est-à-dire un sous-espace F de X tel que E 簾 F soit une décomposition en somme directe topologique de X; on dira dans ce cas que E est complémenté dans X. On montre que pour qu’un sous-espace fermé E de X soit complémenté dans X il faut et il suffit qu’il existe une projection continue P de X sur E; alors E 簾 (I 漣 P)(X), où I est l’application identique, est une décomposition en somme directe topologique de X. Il n’est pas vrai en général que tous les sous-espaces fermés d’un espace de Banach soient complémentés: par exemple, c 0 n’est pas complémenté dans l size=1秊. Toutefois, la propriété indiquée est réalisée dans les espaces de dimension finie et dans les espaces de Hilbert (cf. espace de HILBERT, chap. 3) et elle caractérise ces espaces; plus précisément:a ) Soit E un espace de Banach dans lequel il existe pour tout sous-espace F fermé de E une projection continue de norme 1 de E sur F; alors E est isométrique à un espace de Hilbert.b ) Soit E un espace de Banach dans lequel il existe pour tout sous-espace F fermé de E une projection continue de E sur F; alors E est isomorphe à un espace de Hilbert.Bases de SchauderSoit (x i )i size=1捻N une suite d’éléments d’un espace de Banach E telle que tout élément x de E se décompose de manière unique sous la 秊forme x = x i (x )x i , où les x i (x ) sont i = 0des éléments de K (qui dépendent évidemment de x ). Dans ces conditions, les applications:sont des formes linéaires continues, c’est-à-dire des éléments de E. On dit alors que la suite (x i )i size=1捻N est une base de Schauder de E. Dans les espaces c 0, l p (1 諒 p 麗 + 秊), la suite (e i )i size=1捻N, où e i = ( 嗀i ,j )j size=1捻N ( 嗀ij = o si i j , 嗀ij = 1 si i = j ) est une base de Schauder. Dans l’espace de Banach C[0,1] muni de la norme de la convergence uniforme, la suite de fonctions définie par:Dans un espace de Banach E muni d’une base de Schauder, les combinaisons linéaires finies à coefficients rationnels d’éléments de la base forment une famille dénombrable dense dans E: l’espace E est séparable. La plupart des espaces de Banach séparables que l’on rencontre sont munis de bases de Schauder; on peut néanmoins construire des espaces de Banach séparables qui n’en possèdent pas.4. Les propriétés d’approximationOn supposera désormais que K = R.Une application linéaire d’un espace vectoriel E dans un espace vectoriel F est dite de rang fini si son image est un sous-espace de dimension finie de F. X et Y étant deux espaces de Banach et f une application linéaire continue de rang fini de X dans Y, il est clair, d’après le théorème de Riesz (cf. chap. 1), que l’adhérence dans Y de l’image par f de la boule unité fermée de X est une partie compacte de Y, c’est-à-dire que f est un opérateur compact. Comme on sait d’autre part que dans 硫c (X, Y) muni de la norme des applications linéaires continues une limite d’opérateurs compacts est un opérateur compact, la question qui se pose est de savoir si, pour des espaces de Banach X et Y arbitraires, tout opérateur compact de X dans Y est limite dans 硫c (X, Y) muni de la norme indiquée d’une suite d’opérateurs de rang fini. Ce problème, dit problème de l’approximation, n’a été résolu par la négative qu’en 1973 par P. Enflo; il a donné lieu à l’étude de divers énoncés équivalents et à la mise en place de quelques propriétés voisines extrêmement importantes (ces travaux sont essentiellement dus à A. Grothendieck). On dit que l’espace de Banach X possède la propriété d’approximation (la A.P.) si, pour tout compact Q de X et tout 﨎 礪 0, il existe une application linéaire continue T de rang fini telle que pour tout x de Q on ait 瑩Tx 漣 x 瑩 諒 﨎. étant un réel 閭 1, si on impose à T la condition supplémentaire d’être de norme inférieure à, on dit alors que X a la-propriété d’approximation (-A.P.). Lorsqu’il existe un réel tel que l’espace de Banach X ait la-A.P., on dit que X a la propriété d’approximation bornée (B.A.P.). Enfin, si X a la 1-A.P., on dit qu’il a la propriété d’approximation métrique. On montre que l’espace de Banach X a la A.P. si et seulement si, pour tout espace de Banach Y, tout opérateur compact de X dans Y est limite dans 硫c (X, Y) muni de sa norme usuelle d’une suite d’applications linéaires continues de rang fini.On sait qu’il existe des espaces de Banach qui n’ont pas la A.P. et qu’il existe des espaces de Banach qui ont la A.P. mais n’ont pas la B.A.P. Soit un espace de Banach X ayant une base de Schauder (x i )i size=1捻N, la considération des opérateurs de rang fini Tn n défini par Tn (x ) = x i (x ) x i montre que i = 0X a la B.A.P.; on ne sait pas par contre si tout espace de Banach séparable ayant la B.A.P. possède une base de Schauder.5. Intégration des fonctions à valeurs vectorielles. Mesures à valeurs vectoriellesL’intégration des fonctions à valeurs vectorielles et les mesures à valeurs vectorielles sont des outils intéressants qui permettent en particulier grâce à des théorèmes de représentation de mieux étudier certaines propriétés géométriques des espaces de Banach.Intégration des fonctions à valeurs vectorielles( 行, 淪, 猪) est un espace mesuré par une mesure positive finie 猪; X est un espace de Banach et 龍X est la tribu borélienne de X (cf. INTÉGRATION ET MESURE). Une application f de 行 dans X est dite fortement mesurable si c’est une application mesurable (c’est-à-dire si l’image réciproque par f de tout élément de 龍X est un élément de 淪) et s’il existe un sous-espace fermé séparable X0 de X et un élément 行0 de 淪 de mesure nulle tels que f ( 行 漣 行0) 說 X0.Une application f de 行 dans X est dite simple si elle est mesurable et si son image est un sous-ensemble fini de X.Une fonction simple non nulle s’écrit alors de manière unique sous la forme:où les x i sont des éléments non nuls deux à deux distincts de X, où les Ai sont des éléments non vides deux à deux disjoints de la tribu 淪 et où XAi est la fonction caractéristique de l’ensemble Ai . On peut alors définir l’intégrale de la fonction simple n f = XAi x i par rapport à la mesure 猪 en i = 1posant:(on attribuera à la fonction nulle l’intégrale 0).Toute fonction f de 行 dans X, fortement mesurable, est limite presque partout d’une suite de fonctions simples; cela nous suggère de définir l’intégrale de certaines fonctions fortement mesurables grâce à une approximation par des fonctions simples; cette démarche est possible grâce au lemme suivant:Lemme. Soit (f n 1)n et (f n 2)n deux suites de fonctions simples qui convergent presque partout vers la même fonction simple f et telles que, pour i = 1 et 2, lim 咽 行 瑩f i n ( 諸) 漣 f m i ( 諸) 瑩d 猪 = 0. Alors, les n 轢秊m 轢秊pour tout A élément de 淪 (et même uniformément par rapport à A) et sont égales.On peut donner alors la définition suivante:Définition. Une fonction fortement mesurable f , de 行 dans X, est dite intégrable au sens de Bochner (ou B-intégrable) s’il existe une suite (f n )n de fonctions simples qui converge vers f presque partout et telle que:Par définition, on pose alors:Théorème. Une fonction fortement mesurable f de 行 dans X est B-intégrable si et seulement si 咽 行 瑩f ( 諸) 瑩d 猪 麗 + 秊; dans ce cas, on a de plus l’inégalité:De la même façon que pour les fonctions à valeurs réelles ou complexes, on définit l’espace L1( 行, 淪, 猪, X) des classes de fonctions B-intégrables de 行 dans E (cf. INTÉGRATION ET MESURE, chap. 4), ainsi que les espaces Lp ( 行, 淪, 猪, X), où 1 諒 p 諒 + 秊.Mesures à valeurs vectoriellesSoit ( 行, 淪) un espace mesurable et X un espace de Banach. Une application F de 淪 dans X est une mesure si elle 精-additive: pour toute suite (Ai )i d’éléments deux à deux disjoints de 淪:et si F(brigitteemptyv;) = 0.Notons |F| l’application de 淪 dans R+ définie par:où P est l’ensemble de toutes les partitions finies de A en éléments de 淪; |F| est une mesure positive; quand |F| est une mesure finie, on dit que la mesure F est à variation bornée. Si maintenant 猪 est une mesure positive finie sur l’espace mesurable (E, face=F0021 淪) et si F est une mesure définie sur (E, face=F0021 淪) à valeurs dans X, on dira que F est 猪-continue lorsque lim F(A) = 0. 猪(A) 轢0On peut montrer que, pour que F soit 猪-continue, il faut et il suffit que, pour tout élément A de 淪 tel que 猪(A) = 0, on ait aussi F(A) = 0.La propriété de Radon-NikodymThéorème. Soit f un élément de L1(E, face=F0021 淪, 猪, X); alors la fonction F de 淪 dans X définie par:est une mesure à variation bornée et:Contrairement à ce qui se passe dans le cas de mesures à valeurs réelles ou complexes, la réciproque de ce théorème est fausse. On est amené à introduire la définition qui suit.Définition. On dit qu’un espace de Banach X a la propriété de Radon-Nikodym si, pour tout espace mesuré ( 行, 淪, 猪) par une mesure positive finie 猪, et pour toute mesure à variation bornée F de 淪 dans X 猪-continue, il existe un élément f de L1 (E, face=F0021 淪, 猪, X) tel que pour tout A élément de 淪 on ait:Cette propriété a des applications intéressantes du point de vue des opérateurs:Définition. Soit ( 行, 淪, 猪) un espace mesuré par une mesure positive finie 猪. On dit qu’un opérateur T de L1 ( 行, 淪, 猪) dans un espace de Banach X admet une représentation de Riesz s’il existe un élément g de L size=1秊 ( 行, 淪, 猪, X) tel que pour tout élément f de L1 ( 行, 淪, 猪):Théorème. Un espace de Banach X a la propriété de Radon-Nikodym si et seulement si, pour tout espace mesuré ( 行, 淪, 猪) par une mesure positive finie 猪, tout opérateur T de L1 ( 行, 淪, 猪) dans X admet une représentation de Riesz.La propriété de Radon-Nikodym a d’autre part un aspect géométrique très important:Définition. Un sous-ensemble borné B d’un espace de Banach X est dit dentable si, pour tout 﨎 礪 0, il existe un élément x de B qui n’appartient pas à l’enveloppe convexe fermée de B 漣 B(x , 﨎), où B(x , 﨎) est la boule ouverte de centre x et de raison 﨎.Théorème. Un espace de Banach X possède la propriété de Radon-Nikodym si et seulement si tout sous-ensemble borné de X est dentable.
Encyclopédie Universelle. 2012.